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14 juin 2007 4 14 /06 /juin /2007 23:13
Richard Dansky est un scénariste et écrivain américain,  natif de Brooklyn (ne  vous aventurez jamais à lui dire qu'il est new-yorkais, malheureux!),  désormais installé en Caroline du Nord, où il travaille comme  directeur du design et de l'écriture chez Red Storm  Entertainment.  (Pour ceux qui suivent les jeux vidéos, ces gars là ont créé Ghost Recon et Rainbow Six)

Avant de travailler dans les jeux,  il a  expérimenté de nombreux  emplois,  d'assistant de laboratoire à  responsable  d'écriture d'à peu près tout ce que  White Wolf  a  compté  de  gammes  de  jeux  de  rôles.  Il a notamment écrit plusieurs romans tirés de ces univers (Vampire, Exalted), dont certains sont disponibles en français, ainsi que plusieurs nouvelles de fantastique/horreur, qui elles ne sont pas (encore) parues en France. Son premier roman de fiction "originale" (donc, non issue d'un univers préalablement existant) sort en janvier 2008. Il collabore également à de nombreux sites  d'écriture, dont  Storytellers Unplugged, dont je vous recommande la lecture, et pas uniquement  des articles de Richard. Il tient également un journal de bord souvent très drôle, même si de solides références en culture américaine sont préférables pour en saisir toutes les nuances. (Personnellement, je lui demande à chaque fois de m'expliquer trois références sur quatre)

Pour ceux qui lisent l'anglais dans le texte, je vous recommande chaudement de le commander à sa sortie. De cette façon, vous pourrez vous vanter lors des diners en ville d'avoir découvert le nouveau Stephen King bien avant tout le monde. 

Rien de moins, mesdames messieurs.

Alors je sais ce que vous allez me dire. Il y a des limites à tout, même à la promo, et il arrive un moment où il faut arrêter de raconter n'importe quoi. Et pourtant voilà, c'est la stricte vérité. Ce type, derrière ses airs de geek intégral, son look approximatif et sa passion immodérée pour les Red Sox (les éternels loosers du championnat américain, tellement que c'en est devenu un sujet de plaisanterie nationale, jusqu'à leur récente victoire), ce type est le prochain Stephen King.

J'ai le plaisir de travailler avec Richard depuis plus de 5 ans maintenant, et j'ai lu à peu près tout ce qu'il a écrit, dont son roman: il a un talent phénoménal. On réduit souvent la littérature de genre à des romans de gare vite écrits, vite (et souvent à moitié) lus, alors qu'en fait, certains auteurs transcendent le genre et font purement et simplement oeuvre de littérature. C'est ce que fait Richard.

Derrière une histoire de maison hantée, il vous livre le récit poignant d'un fils unique et de son rapport à sa mère disparue, ainsi qu'une plongée dans le Sud des USA dont il a fait à la fois sa demeure depuis bientôt 7 ans, et son territoire littéraire. Il n'a pas son pareil pour installer une ambiance qui ne ressemble à aucune autre, et transformer une région méconnue en un espace empli de mythes, de démons (au sens figuré comme, moins souvent, littéral), d'un exotisme suintant pour un pur "East Coaster" comme lui et dans lequel il est pourtant autant à l'aise que si il y était né.

Richard a une qualité d'écriture, que ce soit pour les personages ou les dialogues, proprement impressionnante. On peut très souvent juger un livre à la qualité de ses dialogues, un art dans lequel King excellait à sa grand époque. Les dialogues de Richard sont à la fois criant de vérité et d'un naturel jamais pris en défaut. Vous entendez littéralement les voix de ses personnages, ils sont d'une réalité troublante, vous pourriez les rencontrer au coin d'une rue, vous les reconnaitriez. 

Là où Richard fait très fort, c'est qu'il plonge ces personnages dans des situations où il ne fait que suggérer, et où ils se débattent d'une façon très humaine - à défaut de meilleur mot pour l'exprimer. C'est tour à tour touchant, drôle, émouvant et effrayant. Seule une nouvelle de Lovecraft - auquel il a d'ailleurs consacré sa thèse de fin d'études - m'avait réellement fichu la trouille avant sa nouvelle Shadows in Green. Et c'est toujours le ton juste, sans jamais paraître ni forcé, ni fabriqué.

Tout ce qui faisait le sel des meilleurs romans de Stephen King, avec cependant cette touche d'humanité en plus, ce style fluide et jamais systématique, est dans l'oeuvre de Richard.

Je pourrais gloser sur la capacité de travail proprement inhumaine de Richard, qui peut régler en 48 heures ce que 3 scénaristes mettraient 15 jours à entamer, sa gentillesse, sa patience d'ange, son érudition - il lit à la vitesse de l'éclair et retient tout - ou encore son professionnalisme à l'ancienne, loin de certains tâcherons soit-disant d'Hollywood auxquels j'ai pu avoir à faire. Mais non.

Car au delà de tout cela, Richard est avant tout un ami, et mon mentor.

Non pas un de ces mentors autoproclamés qu'il convient d'éviter comme la peste, mais une de ces rencontres comme on en fait très peu dans une vie, qui a une influence considérable et durable, humainement, professionnellement et artistiquement.

Je lui dois à peu près tout ce que je sais de l'écriture, de cette activité et de ce métier. Il m'a vu arriver novice, irréflêchi, désorganisé, trop fougueux pour pouvoir aller au bout de quelque chose, et il m'a patiemment appris le travail, la narration, les règles du jeu.

Bref, le métier.

C'est également à travers lui que j'ai changé radicalement de point de vue sur les Etats Unis et sur les Américains, que j'en ai saisi la complexité, la subtilité, au delà des préjugés très franco-français dont j'étais pétri, comme beacoup. C'est mon Amérique à moi, cultivée, intelligente, engagée, pleine d'un humour anglo-saxon dont je suis un grand amateur.

Vous pourrez penser que l'affection que je lui porte obscurcit quelque peu mon jugement, et c'est bien compréhensible. Mais de fait, je suis, je pense, en dessous de la réalité en ce qui le concerne.

Vous n'entendrez peut-être jamais parler des personnes que je vous ai présentées ici - même si j'espère bien que si! - mais je peux dire avec sérénité que vous entendrez parler de Richard Dansky.

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